En parcourant les textes publiés par le supplément du journal L’Express tiré à l’occasion des 40 ans de l’indépendance de notre nation, j’ai retrouvé dans la contribution d’Armand Maudave la description de la vision d’exception de mon premier patron Amedé Maingard(AHMV).
Je me suis arrêté et pris quelques moments de silence après la lecture du récit cité. J’ai eu besoin de me recueillir et de revivre les moments que j’avais vécus au fil des belles années passées sous la tutelle d’AHMV au sein de Rogers. En effet, ce 13 décembre 1966, ma première rencontre avec AHMV m’a mis en route pour toute ma vie.
Papa était un ami d’AHMV, Rotariens du club de Port Louis. AHMV souhaitait mettre en place un corps de ‘ Young management Cadets’, il demanda à Papa de lui recommander de jeunes. Et voila comment, j’étais reçu pour un entretien. Petit de mes vingt ans, j’étais impressionné de ma première visite chez Rogers : le bureau d’AHMV était situé à l’étage et il fallait passer a travers la salle d’exposition de voitures BLMC pour y accéder. Après une très brève rencontre avec l’impressionnant personnage au regard perçant et de peu de mots, il me conduit au rez de chaussée chez Monsieur Ribet, le responsable du département de l’Aviation ou j’étais assigné pour mon premier poste, agent de réservation.
Un visionnaire d’exception
Il avait avec distinction servi les Alliés contre le Troisième
Reich. Sa connaissance du français avait été jugée utile par les
services secrets britanniques pour lui permettre de s’infiltrer dans
le maquis français et saboter les installations nazies. A la démobilisation
(1946), son palmarès et ses décorations lui valurent de précieux
et durables contacts dans les milieux de la haute administration
française et anglaise. Il s’en servit astucieusement pour
promouvoir et dynamiser, dès son retour à Maurice, des secteurs
encore embryonnaires chez Rogers and Co., notamment l’aviation,
l’hôtellerie, le shipping et le tourisme.
Amédée Hugnin Maingard de la Ville-es-Offrans, ou tout simplement
Dédé, demeure celui qui aura assuré les bases de l’industrie
du tourisme et prévu l’importance des liaisons aériennes qui
la sous-tendent. Dès 1948, des contrats furent signés avec Qantas,
South African Airways et BOAC. Une belle maison coloniale,
aujourd’hui hélas disparue, devint le Park Hotel en 1952. MTTB
(promotion) et Mautourco (transport) furent créés à la même époque.
Les bungalows de Morne Plage virent le jour en 1954 et
New Mauritius Hotels fut incorporé dix ans plus tard. Le slogan de
Hilton était Location, Location and Location, celui d’Amédée
Maingard Qualité, Qualité, Qualité. Le concept haut de gamme qui a
prévalu depuis remonte à son perpétuel souci de perfection.
« Hotels and tourism were, above all else, Dédé’s abiding business
passion », entendra-t-on dire de lui. Il sut en outre entretenir avec
les autorités des relations de confiance et d’amitié. Cela facilita
l’aboutissement de maints projets liés au tourisme. Bel exemple, s’il
en fût, d’un secteur privé avisé et entreprenant, maintenant avec
l’État nouvellement indépendant un partenariat fructueux.